Le délicat levier de la protection sociale

Publié le par DA Estérel 83

CL11112010

 

 

Une réunion de costumes cravates et de tailleurs classiques est passée inaperçue hier matin à l'Hôtel Matignon. Bien loin du brouhaha des sondages, des contorsions écologistes ou du discours convenu de François Hollande devant l'assemblée générale de l'ONU à New York. Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre, a installé les 49 membres du Haut conseil du financement de la protection sociale. Il leur a donné quatre mois pour faire l'état des lieux du système et, surtout, pour proposer plusieurs scénarios de réforme. De tous les comités Théodule qui fleurissent depuis l'avènement du Président Hollande dans un souci ostentatoire de concertation, celui-ci présente une particularité: il a été créé par Nicolas Sarkozy - qui n'avait pas pris le temps de le mettre sur orbite - et conservé par le nouveau pouvoir.

La mission confiée à ce Haut conseil que va présider une économiste reconnue, enseignante au conservatoire national des métiers, Mireille Elbaum, a d'abord une très forte charge symbolique. Les trois branches de la protection sociale - maladie, retraite, famille - sont la clé de voûte branlante, discutée, contestée, mais la clé de voûte d'un édifice qui garantit encore un système de solidarité entre les Français. Sa consolidation, sinon son sauvetage, s'inscrit dans le droit fil du legs du conseil national de la résistance. Le sujet est de nature à rassembler large, du gaullisme social au parti communiste. Pour peu que les 49 membres s'accordent sur des dénominateurs communs qui permettront de revisiter de fond en comble le mode de financement. Jean-Marc Ayrault a en effet rappelé hier que 77% des 650 milliards du budget annuel pèsent uniquement sur les salaires.

C'est l'autre mission du Haut conseil clairement énoncée par le Premier ministre: changer l'assiette des cotisations pour donner plus de compétitivité aux entreprises. Et ce ne sera pas la plus simple. L'issue des travaux est pourtant lourde de conséquences. Si les partenaires sociaux, syndicats de salariés et organisations patronales, campent sur leurs positions, l'édifice national de la protection sociale sera en péril. Si, à l'inverse, le Haut conseil dégage des pistes et un consensus, ce sera tout bénéfice politique pour le gouvernement et plus encore pour un modèle social au service des citoyens. Le Conseil d'orientation des retraites mis en place par Lionel Jospin en 2000 avait réussi à jouer ce rôle d'amortisseur dans le débat et à s'imposer comme référence. Différence de taille: en 2000 une embellie de croissance soufflait sur la France. Cette fois la récession menace. Au risque, pour le pouvoir, de provoquer davantage de radicalité que de consensus.

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