Baisse des salaires, fronde des actionnaires... les grands patrons face à la crise

Publié le par DA Estérel 83

MondeEconomie.png

 

 

Maurice Lévy, président du directoire de Publicis, réclamait en août, dans une tribune du "Monde", "une contribution exceptionnelle des plus riches, des plus favorisés, des nantis".

 

Le scandale est venu d'où on l'attendait certainement le moins. Fin avril, Maurice Lévy recevait 16 millions d'euros de rémunération différée - une somme certes rare, mais pas surprenante pour un patron du CAC 40. Ce qui a surpris, en revanche, c'est que le patron de Publicis ne rechigne pas à recevoir un tel salaire, alors qu'il réclamait en août, dans une tribune du Monde"une contribution exceptionnelle des plus riches, des plus favorisés, des nantis". Sans compter que M. Lévy est également président de l'Association française des entreprisesprivées, qui édite chaque année un code de bonne conduite sur la gouvernance... et la rémunération des dirigeants.

Lire : "Maurice Lévy, dirigeant hyper bien payé" 

Pourtant, depuis deux ans, les salaires des patrons du CAC 40 stagnent, voire diminuent légèrement. Selon Les Echos, leurs salaires ont atteint 96,8 millions d'euros au total en 2011, ce qui représente une légère baisse de 1,5 % par rapport à 2010. Les présidents de LVMH (4,428 millions d'euros), de Danone (4,336 millions d'euros) et de L'Oréal (3,885 millions d'euros) forment le trio de tête. En revanche, du côté des rémunérations variables, la baisse est plus nette (- 7 %), et relève "la plupart du temps" de "la crise", précise le quotidien économique.

Voir le tableau des Echos "Rémunérations des dirigeants des sociétés du CAC 40" (lien payant)

C'est pourquoi certains patrons, comme celui de L'Oréal, ont décidé de faire profil bas. Le PDG du numéro un mondial des cosmétiques, Jean-Paul Agon, a ainsi choisi, dès février, de supprimer les stock-options au sein de son groupe, "pour tout le monde et dès cette année". A la place ont été mises en place des actions gratuites dites "de performance", censées refléter celles de l'entreprise.

Lire : "Le PDG de L'Oréal annonce la fin du système interne de stock-options" (lien abonnés)

LES ACTIONNAIRES SE REBELLENT

Et pour les patrons qui n'auraient pas encore pris de mesures anticrise, les actionnaires sont là pour le leur imposer. Ce sont ceux de Citigroup qui ont, les premiers, osé manifester leur mécontentement, cette année, en votant à 55 % contre le plan de rémunération de leurs dirigeants à la mi-avril - soit 15 millions de dollars de rémunération annuelle - et ce, sur les recommandations des cabinets de conseil ISS Proxy Advisory Services et Glass Lewis & Co.

Lire : "Les actionnaires de Citigroup refusent de voter la rémunération de leurs dirigeants"

Deux jours plus tard, un actionnaire de la banque américaine déposait une plainte auprès d'un tribunal fédéral de Manhattan, à New York, contre les administrateurs de Citigroup, les accusant d'avoir octroyé aux dirigeants des rémunérations disproportionnées.

Lire : "Le rejet du salaire du PDG de Citigroup pourrait faire jurisprudence"

Plus qu'une surprise, c'est un coup d'éclat qu'a provoqué cette fronde inédite, au point que plusieurs analystes n'hésitent pas à parler de "tournant" susceptible debriser enfin l'omerta des banques de Wall Street - qui, en outre, traversent une période difficile.

Lire : "Les banques de Wall Street broient du noir"

croire que les actionnaires des autres grandes banques n'attendaient qu'un exemple couronné de succès pour suivre le mouvement : près d'un tiers de ceux du Credit Suisse et de Barclays ont également rejeté, la semaine suivante, les plans de rémunération de leurs dirigeants. Conséquence, le PDG de la banque britannique, Bob Diamond, et son directeur financier, Chris Lucas, ont décidé d'abandonner la moitié de leur bonus différé pour 2011.

Lire : "Les dirigeants de Barclays renoncent à la moitié de leur bonus différé"

Est venu ensuite le temps des excuses - là encore, inédit. C'est le président de la banque britannique BarclaysMarcus Agius, qui s'y est collé le premier, suivi début mai par Lord Sharman, le président du conseil d'administration de l'assureur britannique Aviva, qui a reconnu "qu'un certain nombre d'actionnaires ont eu le sentiment que nous n'avons pas reflété leur opinion", avant de présenter sa démission. Pourtant, le groupe avait pris - en vain - ses précautions pour éviter ce scénario : le directeur général, Andrew Moss, avait ainsi renoncé à l'augmentation de salaire annuelle qui lui avait été accordée à partir d'avril.

Lire : "Barclays présente ses excuses aux actionnaires"

Dernier mastodonte en date à essuyer une rébellion du même genre, la banquesuisse UBS, dont plus d'un tiers des actionnaires a lui aussi rejeté, jeudi, le plan de rémunération des dirigeants.

Lire : "Les frondes contre les rémunérations des dirigeants se multiplient"

En France, rien de tel, puisque seuls les parachutes et les retraites chapeaux sont soumis au vote des actionnaires, qui semblent seulement un peu plus réticents qu'auparavant. Par exemple, le parachute de Thierry Pilenko, le PDG de Technipn'a obtenu que 69 % des voix, alors que l'Association française de gestion n'avait émis aucun avis négatif, rapportent Les Echos. Pas de révolution à signaler donc - du moins pour l'instant.

Publié dans Economie

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article