Aéroports De Paris: de la sous traitance à la mal traitance.

Publié le par DA Estérel 83

Marianne

 

 

Salaires minables, conditions de travail difficiles, la grève des agents de sureté des aéroports a donné à voir la réalité d'une activité méconnue. Derrière ces grosses entreprises de suretés apparaissent les donneurs d'ordres: les gestionnaires d'aéroports, et le premier d'entre eux Aéroports de Paris 


Ce sera donc une prime de 1 000 € annuels, quand les agents de sureté aéroportuaire en demandaient plus du double : plus 200 euros sur leur fiche de salaire de 1300 € en moyenne.
Lundi 26 décembre, au terme de 11 jours de grèv e, quatre syndicats sur six ont paraphé l’accord avec le patronat des entreprises de sécurité (le SESA) mettant fin au conflit. Grand absent des négociations : Aéroports de Paris (ADP), le principale acteur du secteur avec les plateformes d’Orly et de Roissy où travaillent 5 200 des 10 000 salariés des entreprises de sûreté.
En héritant des infrastructures, ADP, désormais coté en bourse, a comme les autres gestionnaires français d’aéroports, également hérité de la mission de contrôle et de sûreté, auparavant confiée aux forces de l’ordre. Comme nombre d’activités peu rentables et gourmandes en personnel peu qualifié, (accueil des passagers, services de nettoyage), cette mission de service public a le plus souvent été sous-traitée. Ce qui permet à Aéroports de Paris d’expliquer que « Le conflit concerne des employeurs de sûreté et leurs salariés, et ADP n'a donc pas à y participer ».

Pourtant, derrière ce conflit très dur, apparaît bien en filigrane la question de la sous-traitance. « Les appels d’offre d’ADP sont tirés au cordeau, et laisse au final peu de marge aux entreprises de sureté dans leur politique salariale », s’inquiètent Christophe Naudin, spécialiste de la sureté aéroportuaire qui y voit la source principale du couple infernal précarité des agents et services rendu en matière de sureté lacunaire.
Les rapports parlementaires sur la sureté des aéroports, comme celui de Charles de Courson (NC), député de la Marne, pointent tous le peu d’efficacité du contrôle, tout en dénonçant l’énormité de son coût.
Pourtant de l’argent il y en a. Pléthore: 624 millions d’euros que payent les voyageurs à travers la « taxe de sureté » embarquée dans la taxe d’aéroport de 11,5€ cette année contre 8,05 € en 2003, et moins de 3 € en 2001. Sur la manne de 436 millions que collecte ADP au titre de cette taxe d’aéroport, seulement 170 millions finissent dans les poches des sociétés de sûreté, selon le rapport annuel d’ADP.
Et les prix continuent d’augmenter pour les voyageurs, les sous traitants ont vu eux leur budget se réduire, puisqu’en 2009 ADP leur a versé 3,4 millions de plus qu’en 2010… 

  


Pas question cependant pour les soumissionnaires de montrer ces fameux appels d’offre où l’unité de compte du temps de travail des agents est le quart d’heure tandis que les possibilités pour ADP de mettre à l’amende pour défaut de service ses prestataires sont multiples.

 

D’autant que les contrats sont renouvelés tous les trois ans. Cette relation déséquilibrée entre prestataires et commanditaires ne manque évidemment pas de se matérialiser dans le traitement des agents de sûreté : « les locaux mis à disposition par ADP sont piteux, au 5éme sous sol, mal chauffés en hiver, mal climatisés en été. La cantine (un peu plus de 3€ le repas) réservée aux personnels d’ADP oblige les agents à apporter leur gamelle», explique un observateur. 
  

Cela n’a pas échappé aux députés Daniel Goldberg et Didier Gonzales auteurs du rapport d’information « sur la sûreté aérienne et aéroportuaire » : « les renouvellements assez fréquents des marchés (conclus en principe pour trois ans) tendent à fragiliser la situation des agents de sûreté qui sont susceptibles de perdre les avantages dont ils bénéficiaient, à l’occasion de ces renouvellements. »

 

Une précarisation que les agents de sureté ont en partage avec les autres personnels assurant la sous-traitance, comme le personnel au sol qui assure l’embarquement des voyageurs. La situation des agents de sureté est telle, que le rapport d’information préconise de leur accorder « des avantages comparables à ceux des autres personnels aéroportuaires ».  
  

En attendant  chez ADP, tout est bon pour peser à la baisse sur les prix et s’assurer une marge confortable. Pour cela ADP dispose d’un dernier levier: Alyzia Sûreté, sa filiale toute prête à maintenir les tarif raz les pâquerettes. Le gestionnaire n’entend pas se priver d’un si bon levier. La cession d’Alyzia récemment annoncée exclut de la vente la branche Sureté qui demeure dans les mains d’ADP. 
  

Résultat ICTS, l’un des quatre grands du secteur de la sureté aéroportuaire, affiche une marge de 4 %, contre 40 % pour ADP.     

Publié dans Société

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