Pulvar-Montebourg, un beau mariage éthique...

Publié le par DA Estérel 83

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Pour notre blogueuse associé Aliocha, la position d'Audrey Pulvar à la tête des «Inrockuptibles» est intenable. Elle ne peut qu'être source de soupçons de conflits d'intérêts. Pour ne pas gêner l'action de son compagnon, elle aurait dû refuser le poste qui lui a été offert.

(Audrey Pulvar et Arnaud Montebourg, octobre 2011 - DUPUY FLORENT/SIPA)
(Audrey Pulvar et Arnaud Montebourg, octobre 2011 - DUPUY FLORENT/SIPA)
Tandis que Vincent Peillon souhaite inscrire la morale laïque au programme scolaire – ce qui amuse mon ami Philarête – le gouvernement s’embourbe dans le dossier Pulvar-Montebourg-Pigasse, faute précisément d’avoir appliqué les principes de base de l’éthique. Pour les distraits, je rappelle le contexte. Les Inrocks ont embauché Audrey Pulvar, compagne du ministre du redressement productif Arnaud Montebourg, au mois de juillet dernier en qualité de directrice de la rédaction (le plus haut poste dans un journal). Tout récemment, la banque Lazard, dirigée par Matthieu Pigasse, (également patron des Inrocks ainsi qu’actionnaire du Monde et duHuffington Post), a obtenu de Bercy un marché public : c’est à elle que revient le soin d’orchestrer le montage de la Banque publique d’investissement destinée à financer les PME. Et hop ! Des esprits chagrins ont tout de suite imaginé que l’obtention de ce marché était la contrepartie de l’embauche d’Audrey Pulvar. Un renvoi d’ascenseur en quelque sorte. Le communiqué de presse (Source Bakchich via l’excellent dossier d’@si ) évoque une décision commune de Pierre Moscovici et d’Arnaud Montebourg. Mediapart, qui défend l’actuel gouvernement avec autant d’empressement et de naïveté qu’il enfonçait le précédent, avance que Montebourg aurait été en réalité écarté par Moscovici, dont il contesterait d’ailleurs la décision. On est tenté de dire : peu importe le soupçon est là, et c’est grave. 

Lors de la nomination d’Audrey Pulvar à la tête des Inrocks quelques journalistes avaient discrètement protesté, mais leurs inquiétudes déontologiques s’étaient retrouvées englouties sous le flot habituel d’arguments féministes fumeux scandés par des esprits aussi généreux que légers :«Non, une femme ne pense pas forcément comme son homme, non elle ne doit pas lui sacrifier sa carrière, oui Audrey Pulvar est indépendante, par principe et jusqu’à preuve du contraire». En réalité, cela posait bel et bien un problème : la compagne d’un homme de pouvoir à la tête d’un organe du contre-pouvoir, ça fait désordre. Objectivement. Inutile de polémiquer sur la capacité ou non d’Audrey Pulvar à s’émanciper de son homme. Cette seule question est une insulte à son endroit, même quand on pense bien faire en y répondant par l’affirmative avec conviction.


MAUVAIS EXEMPLE

Bien sûr qu’elle est présumée professionnelle et indépendante, le sujet n’est pas là. Le sujet c’est que sa position est objectivement intenable car source potentielle de conflits d’intérêts et donc de soupçon. Dans ce genre de situation, les professions plus disciplinées que la nôtre sur le terrain déontologique (mais pas forcément meilleures) ont une solution fort simple : l’abstention. En cas de risque de conflit d’intérêts, on refuse d’accomplir la mission, d’occuper le poste, de réaliser l’action qui pose un problème d’apparence d’indépendance. Pour éviter précisément ce qui est en train de se produire. On redoutait une influence gouvernementale sur la ligne éditoriale du journal, le problème a surgi ailleurs, ce qui illustre au passage le nombre d’ennuis auxquels on s’expose quand on refuse d’appliquer la solution dictée par l’éthique. Bien sûr, l’apparence d’indépendance n’est pas une garantie absolue, mais c’est ce qu’on a trouvé de mieux pour éviter de s’embarquer dans des spéculations hasardeuses sur l’indépendance profonde de chacun. 

On observera au passage que c’est un fort mauvais exemple à présenter aux futurs élèves des cours de morale laïque annoncés par Vincent Peillon. Les gamins auront beau jeu de citer le comportement pour le moins léger des politiques afin de mettre leurs enseignants dans l’embarras (ah les sacripants !). C’est le plus vieux réflexe du monde que d’invoquer, pour s’affranchir d’une règle, l’excuse du voisin transgresseur. Alors quand en plus le mauvais sujet appartient à l’élite, celle-là même qui est censée donner l’exemple, l’argument prend une force toute particulière. Bonne chance aux futurs enseignants de morale laïque !

Publié dans Billet

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