Immigration : Sarkozy tel qu'on ne le commente plus

Publié le par DA Estérel 83

Marianne2-2012

 

 

En meeting, mardi soir à Morlaix, le président sortant a consacré un long développement à la notion de frontière. Et bousculé, mine de rien, la frontière qui sépare les arguments qui parle à la raison et ceux qui frappe aux tripes. Sans commentaire.

(Nicolas Sarkozy à Morlaix - F.LEPAGE/SIPA)
(Nicolas Sarkozy à Morlaix - F.LEPAGE/SIPA)
Il faut le voir pour le croire (31è minute de la vidéo), il faut lire Nicolas Sarkozy dans le texte. Voici, extrait du site officiel lafranceforte.fr, un extrait du discours prononcé mardi soir par le président-candidat-candidat-président, à Morlaix. 

« Ça va me permettre de parler d’un sujet qui est vraiment passionnant et qui doit être mis dans le débat politique, c’est la question des frontières. Je voudrais attirer votre attention sur cette question centrale. Qu’est-ce qui fait que vous avez envie de tendre la main au voisin et de le recevoir chez vous ? Si vous le faites, c’est parce que l’endroit où vous êtes, sa propriété n’est pas contestée. La frontière protège, le cadastre protège, quand on est chez soi, on tend la main et on accueille bien volontiers. A la minute où sa maison n’est pas sa maison, mais peut-être celle d’un autre, à cette minute-là, la compétition et l’affrontement s’opposent. Les frontières sont pour un pays ce qu’est le cadastre pour une propriété. Si demain, vous êtes condamné à avoir des maisons sans porte, sans fenêtres, sans volets, est-ce qu’il n’y aura pas la peur à l’intérieur des maisons ? Si demain, chacun peut s’installer dans votre jardin ou dans votre appartement, parce que la propriété de cette maison, du jardin, même si vous êtes locataire, parce que le titre de bail est indéfini, réfléchissez, le sentiment d’angoisse qui vous étreindra à ce moment-là. 

Ce fut une erreur de penser que la nation n’existait plus et que les frontières n’existaient plus. Je m’en explique. Regardez dans la compétition mondiale, la Chine renonce-t-elle à son identité de nation ? Les États-Unis renoncent-ils à leur identité de nation ? Le Japon renonce-t-il à son identité de nation ? L’Afrique du Sud renonce-t-elle à son identité de nation ? Au nom de quoi la France serait-elle le seul pays au monde à qui on contesterait le droit de savoir qui elle a le droit de recevoir, qui elle veut recevoir sur son territoire et qui elle ne veut pas recevoir ? Et le seul pays du monde où on n’aurait pas le droit de dire, oui, quand je regarde ce long manteau d’églises et de cathédrales, nos racines, à nous, en France, elles sont chrétiennes ? Et ce n’est pas parce qu’on dit cela qu’on fait l’apologie ou la propagande pour une église ! » 

Voilà. C’est dit. Ce discours n’a pas été commenté à cette heure, nulle part. Pas même par ceux qui avaient grimpé aux rideaux lorsque le même orateur avait inventé, il y a cinq ans, le ministère de l’immigration et de l’identité nationale. Pourtant, cette politique à l’estomac pointe non pas l’immigration comme un phénomène économique ou culturel, mais comme une prédation de l’espace privé. La métaphore employée par Sarkozy, apparemment sans note, évoque la conquête du territoire français par une armée d’occupation, vue du jardin de mon pavillon. A chacun, sur ce canevas, d’imaginer son récit, de deviner le profil des prédateurs, d’entendre les cris, d’appréhender les crimes, de hurler la violence. 

A Morlaix mardi, il n’était pas question d’immigration, pas même d’invasion, mais de légitime défense. 

Ce procédé oratoire est-il si banal qu’il ne mérite pas d’être relevé ? Nicolas Sarkozy a-t-il perdu tout espoir dans la raison électorale pour user d’une pareille rhétorique ?

Publié dans SARKOZY

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