Un gestionnaire de fortune a peur d'être tondu par Hollande

Publié le par DA Estérel 83

Chroniques de Juan

 

 

Un cabinet de gestion de fortune s'est offert une pleine page publicitaire dans le Monde du 5 juillet pour dénoncer la « tonte fiscale » à laquelle la France serait soumise par François Hollande. 

Cette publicité est en fait l'éditorial du patron de ce cabinet, Edouard Carmignac, publié sur le site de l'entreprise le 4 juillet dernierCarmignac Gestion est une société de placements en Bourse pour des particuliers ou des conseillers indépendants (40% de sa clientèle), des institutions (10%), ou des établissements financiers (50%) . Pour 2012, elle déclare gérer ainsi environ 48 milliards d'euros, la moitié placée en actions (54%), l'autre en obligations (46%), notamment d'Etat.

Les arguments employés par le président-fondateur de ce fond de placement sont caricaturaux et emblématiques

1. « La mise en place d’une fiscalité confiscatoire décapiterait les états-majors de nos entreprises, accélérant l’exode de leurs dirigeants, tout en gelant l’investissement chez les PME.  » Si l'on omet quelques instants le prélèvement de 75% de la tranche de revenus supérieure à un million, les autres augmentations d'impôts révélées la semaine dernière sont (malheureusement) très mesurées pour les plus riches. Le matraquage fiscal dénoncé par la droite n'a pas eu lieu.

2. L'auteur accuse Hollande « de tondre également les classes moyennes » ce qui «renforcerait la fragilisation de la valeur travail amorcée par les 35 heures ». Il n'en sait rien, et n'apporte aucune preuve. C'est l'habituel délire des militants sarkozystes les plus aigris. Le gouvernement Sarkozy a enflammé les prélèvements obligatoires du plus grand nombre, réduit les remboursements de santé, allongé les cotisations retraites. Mais on appelait cela de la «» réforme 

3.  « La surfiscalisation des heures supplémentaires rognerait » le pouvoir d’achat des classes moyennes. De quoi parle-t-il ? Sans doute de la suppression, annoncée, de la défiscalisation des heures supplémentaires. Notez la formule: retirer une exonération (partielle) de cotisations sociales et d'impôts sur le revenu devient une « surfiscalisation ». C'est du grand n'importe quoi ! Mieux, le gestionnaire de fortune ne dit mot de l'augmentation générale de la TVA décidée par Nicolas Sarkozy et annulée par François Hollande.

4. Carmignac est en rage que François Hollande veuille ainsi « tondre l’ensemble du pays afin d’assurer la survie d’un modèle social obsolète ». Lors du premier choc de la Grande Crise, en 2008/2009, ce « modèle social obsolète » a justement permis au pays de résister plus que d'autres: le poids des rémunérations publiques et transferts sociaux a évité à la consommation de s'effondrer; les filets de sécurité sociale ont insuffisamment joué mais joué quand même; les retraites, heureusement financées par répartition et non par capitalisation, n'ont pas disparu. Carmignac n'est pas à une contradiction près: quelques lignes plus bas, il évoque la nécessité de « consolider la viabilité de l’essentiel de nos avancées sociales». 

5. Au détour de l'un de ses arguments creux, on comprend enfin les vraies raisons de la rage de ce fortuné: « le projet d’augmentation du Livret A faciliterait certes le placement de la dette publique, mais engouffrerait une part accrue de l’épargne populaire dans un placement à la rentabilité médiocre. » La belle affaire ! Le gestionnaire de fortune plaide pour sa paroisse, le placement privé plutôt que le Livret A. Le lobbyiste est médiocre.

Finalement, cette intervention politique dévoile le bien faible sentiment patriotique de son auteur. Les temps sont rudes, la solidarité est nécessaire. Mais voici qu'il ne pense qu'à hurler pour son argent: « La mise en place d’une fiscalité confiscatoire décapiterait les états-majors de nos entreprises, accélérant l’exode de leurs dirigeants ». Ces riches développent toujours la même argumentation: pas touche à nos revenus, surtout de la rente (les placements) sinon le pays va sombrer...

Fichtre ! L'exode ! On se croirait en 1789...

Rappelons l'une de nos propositions: mais pourquoi donc ne pas déchoir les exilés fiscaux de leur droits civiques ?

Ami sarkozyste, reviens.

Il faut payer.

Publié dans SARKOZY

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