Pourquoi Sarkozy envisage-t-il sa mort politique ?

Publié le par DA Estérel 83

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(Demi-) scoop : le Nicolas Sarkozy est un animal politique périssable. Et c’est lui-même qui le dit, invité de RMC et BFM TV. « Si les Français devaient ne pas me faire confiance, est-ce que vous croyez vraiment que je devrais continuer dans la vie politique ? La réponse est non […] je dis aux Français je me battrai de toutes mes forces pour avoir votre confiance, pour vous protéger, pour vous conduire, pour faire la France forte, mais si tel n’est pas votre choix, je m’inclinerai et c’est ainsi et j’aurai fait une très belle vie politique ». Demi-scoop seulement, car il avait déjà évoqué cette possibilité lors de son escapade guyanaise, il y a quelques semaines.

Il y a deux écoles pour interpréter cette sortie. Celle qui y voit une faute politique et communicationnelle, constituée par le simple fait d’évoquer sa possible défaite. Et puis celle – à laquelle je souscris – qui interprète ce geste comme un coup, risqué certes, mais cohérent avec l’actuelle séquence politique du candidat sortant.

 

Quels bénéfices peut-il en attendre ?

 

D’abord, s’humaniser. Le « politique professionnel » a mauvaise presse en ce moment plus que jamais en France. Cette mauvaise image est élevée au carré dans le cas de soupçons d’arrivisme et d’ambition dévorante, tares dont Sarkozy a été, et est sans doute encore, un des emblèmes dans l’esprit des Français. En expliquant que la politique peut n’être qu’un des épisodes de sa vie – et donc qu’il peut faire quelque chose d’autre – le candidat de la droite se rapproche de ses concitoyens. C’est la suite du mea culpa de Des Paroles Et Des Actes. Et peut-être aussi une façon de durcir l’opposition avec son rival socialiste, dont il rappelle souvent qu’il est d’abord un dirigeant de parti politique.

 

Ensuite, montrer l’importance qu’il accorde au choix démocratique des Français, au point de le sur-interpréter. « Si tel n’est pas votre choix, je m’inclinerai ». Personne ne lui demande de tout arrêter s’il n’est pas élu. Mais en procédant de la sorte, il montre que lui, l’autocrate fustigé, respecte plus que personne l’expression populaire. En cohérence avec la pratique  (gaulliste) du référendum qu’il entend par ailleurs promouvoir.

 

Enfin, dramatiser l’enjeu des dernières semaines de campagne, en inversant d’une certaine manière le référendum anti-Sarkozy qu’il craint au second tour de l’élection. En expliquant aux électeurs que voter contre lui, c’est mettre un terme à sa carrière politique, Nicolas Sarkozypasse de bourreau à victime. Voter contre lui n’est plus un geste libérateur, un geste de ras-le-bol, mais un meurtre symbolique. Voulez-vous vraiment tuer l’homo publicus Sarkozy ? Une pression qui, à défaut de s’exercer efficacement sur les antisarkozystes virulents à gauche, peut au moins contribuer à resserrer un peu plus encore les boulons dans son propre camp.

 

Romain Pigenel

Publié dans Billet

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